Vie associative et avenir de la FMQ !
Par Jean-Pierre Fréchette, d.g. FMQ
Vivre en société n’est pas toujours facile et pourtant c’est grâce à la vie en société que l’humain a pu se développer et bâtir des cités et des civilisations ! Il en est un peu de même pour les associations de motocyclistes qui se sont multipliées au fil des années, mais où l’on constate, du moins pour la FMQ, que le mouvement associatif se transforme et perd du terrain au profit de l’individualisme.
La société au sein de laquelle nous vivons encourage les individus à bâtir leur identité par la consommation rapide de biens et services, et par la réponse à leurs besoins personnels en premier lieu. Cela ne veut pas dire que certains ne sont pas concernés par l’altruisme et par le don de soi au sein de divers organismes de charité, mais ces individus sont des exceptions. Nous pourrions aussi ouvrir ici un débat sur la question des libertés individuelles qui peuvent s’exercer au détriment des libertés collectives et du respect d’autrui autant que de soi-même, mais cela demeure un autre sujet !
Sauf pour quelques-uns, les communications vitales entre nous tous se font de plus en plus par le biais des technologies, ce qui n’était pas le cas quand le cellulaire ou l’internet n’existaient pas. L’individualisme croissant se fait donc possiblement au détriment des associations qui ne trouvent plus de relève ni de bénévoles, alors que les communications entre les individus sont pourtant plus nombreuses, instantanées et plus faciles, notamment avec le soutien des réseaux sociaux.
Bon ou mauvais, mon exemple personnel est probablement assez éloquent à ce sujet; en effet, lorsque je suis devenu membre de la FMQ en 2001 ou en 2002, c’était essentiellement parce que je connaissais l’un des dirigeants de la défunte association AM Tétreauville qui me disait que j’économiserais 200 $ sur mes assurances en joignant leur association. Le calcul était simple à faire de sorte que je suis devenu membre et que je le suis resté jusqu’à la dissolution de l’association, mais sans jamais avoir participé à aucune activité sociale ou à aucune randonnée organisée avec eux.
En tant que d.g. de la FMQ, je n’ai pas non plus participé à aucune activité associative pour différentes raisons. En bref, j’ai toujours préféré faire des « rides » avec quelques vieux « chums », mais rarement avec plus que trois ou quatre motos ! C’est peut-être aussi ma nature de loup solitaire et/ou mon caractère impatient qui font que je n’aime pas attendre ou dépendre trop des autres. Pour moi, une simple mention sur Facebook ou encore une rencontre entre amis suffisent en général à susciter l’organisation d’une randonnée. À deux ou à trois, les règles de conduite sont faciles à établir, on se connaît déjà et tout semble plus facile. Tout cela ne veut pas dire qu’il n’y a pas de plaisir à rouler en groupe plus nombreux, et les membres actuels de la FMQ peuvent en témoigner, mais ce n’est pas tout le monde qui recherche cela même si les motocyclistes se regroupent encore principalement pour des raisons de camaraderie et d’activités sociales à partager.
Selon moi, les technologies de communication favorisent le développement de rapports fluides et rapides entre les individus, ce qui fait en sorte que les relations sont plus nombreuses, presque virtuelles dans bien des cas, et les rendez-vous sont faciles à organiser en petits groupes. Bref, l’ère des grands rassemblements de motocyclistes semble presque révolue et c’est pourquoi le nombre des associations classiques diminue donc tranquillement au profit d’associations presque virtuelles. À titre d’exemple, sur Facebook, je suis membre de plus d’une vingtaine de groupes d’intérêt différents, la moto en comportant une dizaine.
Impact sur le modèle fédératif ?
Les changements que l’on observe au sein des modèles associatifs ont un impact direct sur le modèle de fonctionnement de la plupart des fédérations. Les modèles d’affaires fédératifs se transforment également, la FMQ étant à même de constater que dans la dernière décennie, près de la moitié des associations fédérées se sont dissoutes et quelques-unes d’entre elles sont devenues indépendantes.
Dans les associations, plusieurs se disent qu’est-ce que ça donne d’être membre d’une fédération alors que je peux m’organiser tout seul avec quelques amis ? À quoi ça sert de payer une cotisation additionnelle en plus de celle de mon association ? En tant qu’OBNL, la FMQ utilise les fonds des cotisations perçues pour maintenir son fonctionnement de base, garantir des couvertures d’assurances pour les administrateurs des associations ainsi que pour leurs randonnées et leurs activités sociales, et pour financer des activités de représentation.
Il n’y a pas de bureau permanent avec pignon sur rue. Une équipe de pigistes ainsi qu’une douzaine de bénévoles au CE/CA constituent la base opérationnelle pour gérer les affaires courantes et maintenir des activités de lobbying auprès des gouvernements. Les membres du CE/CA et les pigistes voient aussi à organiser les ateliers et tables de concertation, sans oublier la logistique pour les présences aux Salons de la moto, la gestion des formations Moto Pro FMQ à rabais pour les membres, de même que la production de divers contenus d’information et de communication.
Il est certain que le rôle de rassembleur que jouait antérieurement la FMQ, est aujourd’hui moins pertinent dans un contexte de communautés virtuelles et de communications instantanées. Si à une époque la FMQ regroupait presque 30 % de la population des motocyclistes, aujourd’hui la totalité de ses membres fait moins de 2 % des quelque 200 000 adeptes de la moto. Bref, la capacité de la FMQ à rejoindre une portion significative de l’ensemble du milieu par des adhésions a été réduite de façon importante au fil du temps, mais son rôle de représentation et son positionnement d’interlocuteur avec les gouvernements n’a pas diminué pour autant, en particulier en ce qui a trait aux tables de concertation et aux projets de développement d’activités de perfectionnement et de sécurité.
C’est ainsi que la FMQ a effectué plusieurs approches auprès de la SAAQ et du MTQ pour mettre de l’avant divers dossiers relatifs à l’amélioration des conditions du milieu et à la promotion d’activités de sécurité. Elle intervient notamment comme gestionnaire d’activités et fournisseurs de services pour des projets financés par le Programme d’aide financière du fonds de la sécurité routière. Sans aide financière ni aucune subvention pour ses frais de fonctionnement, la FMQ agit aussi comme intervenant au sein du comité d’experts en accidentologie et à titre d’intervenant au sein de la Table moto de la SAAQ pour la tarification ou encore pour l’amélioration des infrastructures du MTQ. En conclusion, la FMQ a poursuivi ses démarches afin de favoriser le développement et la reconnaissance du statut particulier des motocyclistes sur les routes du Québec pour l’ensemble des usagers.
Les projets d’avenir !
Si la plupart des activités de représentation de la FMQ auprès des instances gouvernementales ont été effectuées de façon bénévole, et ce en dépit d’un financement décroissant provenant du « membership », cette situation nous met dans une situation précaire face à la pérennité des opérations.
C’est pourquoi la FMQ travaille aussi à trouver de nouvelles sources de financement incluant la possibilité de mettre sur pied un projet de « Bureau du motocylisme » qui agirait comme guichet unique de services et comme organisme de représentation et de recommandation auprès des ministères concernés. Le MTQ est le principal interlocuteur pour ce projet, mais la SAAQ est également concernée par cette démarche. Par ailleurs, si ce projet fonctionne, la collaboration de la FMQ serait vraisemblablement axée sur la gestion et la promotion de programmes de prévention et de sécurité, mais à ce stade rien ne garantit qu’elle serait capable d’en tirer un revenu indirect pour le financement de ses opérations et la pérennité de sa mission.
Au-delà de sa capacité à représenter une portion significative de la population des motocyclistes au sein d’un organisme officiel, l’avenir de la FMQ passe aussi en partie par la mise en place de moyens susceptibles d’aider les dirigeants d’association à recruter leurs membres au sein des nouvelles générations de motocyclistes, à planifier la relève et à trouver les moyens de maintenir leur base de membres en dépit des tendances à l’individualisme. Un soutien à l’amélioration des relations serait certainement fort utile entre la direction de la FMQ et la base, mais il ne faut pas oublier que cela implique aussi que les associations transmettent leurs contenus et adoptent de bonnes pratiques de communications pas seulement avec leurs membres mais aussi avec les directions régionales pour faire remonter l’information.
En complément de la plate-forme YAPLA du site fmq.ca qui propose aux associations et aux futurs membres de s’inscrire de façon aisée et pratique, il faut aussi valoriser l’utilisation des nouvelles technologies pour rejoindre de nouveaux membres. Il faudrait possiblement mettre de l’avant que la vie sociale proposée par les associations a une valeur et une richesse unique en soi. Si les individus qui s’organisent par eux-mêmes font des excursions rapides et souvent improvisées, peut-être que les associations auraient intérêt à mettre en valeur leur capacité à organiser des randonnées plus structurées, souvent des randonnées de plusieurs jours ou même des voyages de moto. Les associations fédérées offrent généralement un environnement plus sécuritaire pour certains motocyclistes qui aiment rouler en plus grande formation incluant un encadrement avec un responsable sécurité.
La FMQ pourrait aussi transformer le modèle d’affaires de sa prestation de stages de réadaptes et de cours de perfectionnement de conduite. Encore là cependant, les ressources de formation et les capacités du marché sont limitées. La FMQ a toujours préconisé d’offrir des cours Moto Pro à rabais pour ses membres, un avantage en lien avec sa mission axée sur la sécurité, mais elle ne pourra pas garantir d’être en mesure de le faire très longtemps à moins que la SAAQ n’intervienne éventuellement en soutien à la formation préventive de manière à améliorer le bilan routier. Finalement, l’adoption lors de la récente TCA de la création d’une nouvelle catégorie « d’amis » ou de « sympathisants» de la FMQ pourrait possiblement lui permettre d’augmenter ses rangs, mais seul le temps dira si cette approche va être gagnante.
D’ailleurs si vous êtes un individualiste avec une conscience sociale, n’hésitez pas à adhérer à titre de « sympathisant » de la FMQ afin de supporter sa mission qui a pour objectifs i) de sauver des vies par ses formations Moto Pro FMQ, ii) de vous représenter auprès des gouvernements, et iii) d’améliorer les conditions de l’ensemble des motocyclistes sur la route avec un code d’éthique comprenant :
• La promotion du civisme, de la sécurité et de l’entraide entre motocyclistes;
• Le respect des lois et des droits de tous les citoyens incluant ceux des motocyclistes;
• La promotion d’un cadre d’activités qui favorisent le partage de connaissances et d’expériences susceptibles de favoriser un usage sécuritaire de ce moyen de transport;
• La valorisation de l’image du monde de la moto adhérant à cet ensemble de valeurs